Le Narratoire #4 : Invisible

Toutes les semaines, découvrez une courte chronique sur une personnalité ou un fait original, et un exercice d’écriture. Le but ? Stimuler l’imaginaire.

Sir Arthur Conan Doyle spirit

Photographier l’invisible

La photographie occulte naît au XIXème siècle. Nous découvrons le médium photographique ; au-delà de l’avancée scientifique, on s’interroge sur les possibilités artistiques de ce nouveau procédé. Le spiritisme est alors en vogue -même Victor Hugo discute avec les morts.

En cette période troublée par la guerre (la guerre civile américaine et, plus tard, la Première Guerre Mondiale), nombreux sont les endeuillés qui cherchent à retrouver leurs proches disparus. Certains photographes, flairant l’opportunité, se convertissent alors à la photographie spirite. Parmi eux, Édouard Buguet et William H.Mumler, qui souffrirent tous les deux des retombées juridiques de leur activité. Se prétendant médiums, ils réaliseront une grande quantité de portraits d’esprits posant à côté de leurs proches.

Un autre type de photographie, la photographie dite « des fluides », apparaît à la fin du XIXème siècle. Il s’agit de capter le fluide, l’aura, l’énergie vitale qui peuvent entourer un sujet. On essaie même de photographier les pensées. Ce courant, qui se justifiait par ses ambitions scientifiques, persiste encore à notre époque. Au milieu de cette période riche en expérimentations, apparaissent également les photographies de médiums, les plus connues et les plus troublantes étant celles de la production d’ectoplasmes.

Ici, la question n’est pas de s’interroger sur la malhonnêteté des photographes, sur le montage ou les techniques utilisées pour tromper, mais sur l’éternelle question de notre relation à la mort. On parle souvent d’immortaliser un sujet sur la pellicule. On immortalise un moment. On l’empêche de mourir, on le fige dans le temps. N’est-ce pas ce que recherchaient ces personnes qui ont poussé la porte de la boutique d’un Buguet ou d’un Mumler ? Le véritable sujet de ces photographies n’est-il pas le personnage (car il le devient, par l’impulsion de l’imaginaire) assis près de l’invisible ? Rendez-vous plus bas pour le laboratoire d’écriture.

Mumler 4

Les photographies d’Édouard Buguet :

Les photographies de William H.Mumler : 

Mary Todd Lincoln avec le fantôme de son mari, Abraham Lincoln.
Mary Todd Lincoln avec le fantôme de son mari, Abraham Lincoln.

Mumler

Mumler 2

Mumler 5

Mumler 6

Les photographies de William Hope :

William Hope photo 4

William Hope photo 3

William Hope photo 2

Les photographies de W.Fallis (1901) : 


Laboratoire d’écriture

Imaginez la visite chez le photographe.

Durant cette séance photo, deux points de vue principaux et évidents : celui du photographe et celui du client -ou parfois d’une famille entière. Il vous appartient de choisir celui ou ceux qui guideront votre récit.

Mais imaginez maintenant qu’un troisième point de vue, inattendu et silencieux celui-ci, vienne s’ajouter à l’histoire : celui du fantôme lui-même, convoqué peut-être contre son gré. Est-ce l’appareil photographique qui le force à revenir un moment dans le monde des vivants, un peu comme si l’on tirait le rideau derrière lequel le corps était caché ? Si oui, comment l’esprit vit-il cette brusque renaissance ? Que lui arrive-t-il pendant les quelques secondes de prise de vue ? Attendait-il cette apparition pour faire passer un message ? Comment peut-il l’expliciter sur une seule photographie ? 

Ne vous limitez pas à vos croyances personnelles. Imaginez l’invisible. Vous disposez de trois personnages dont les objectifs, les caractères sans doute, se confrontent le temps d’une séance. Trois corps et trois esprits.
Réveillez-les.


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Photographie de couverture : Sir Arthur Conan Doyle with psychic extra, c.1922